Zut, raté !
Les mathématiques des Grecs de l'antiquité étaient principalement divisées en arithmétique et géométrie (on se souvient d'Euclide). Leur notation les limitait à écrire des entiers naturels non nuls : ils ne connaissaient pas le zéro, les nombres négatifs et les décimales après une virgule qui n'existait d'ailleurs pas. Mais la géométrie avait déjà fait surgir des difficultés qui y étaient liées sans que de véritables solutions ne soient trouvées : un des dialogues de Platon met en scène Socrate qui montre que si l'on a un carré d'une surface donnée, on n'arrive pas à calculer la longueur - entière - du coté du carré qui aurait une surface double (en fait, il semble que ce soit surtout Platon lui-même qui s'attachait aux mathématiques).
Pourtant, les Grecs auraient pu aborder ces notions grâce à une géométrie très simple, gagnant du même coup des siècles par rapport à ce qui s'est passé. Il suffit de tracer une droite, où est placée arbitrairement une marque qui sert de point de départ (ce que nous appellerions l'origine). La distance à celui-ci d'un endroit de la droite est par exemple mesurée pour eux en pieds. Pour faire une addition A+B, on se décale de A pieds de l'origine, puis on continue dans le même sens de B pieds, ce qui donne un intervalle correspondant à la somme. Pour la soustraction A-B, il y a toujours un déplacement de A mais ensuite on repart en sens inverse de B pieds, l'écart de l'origine donnant la différence. L'opération A-A nous fait bien sûr revenir au point de départ. En pratiquant un tel exercice, ils auraient constaté qu'il leur manquait une notation pour décrire une distance nulle.
Maintenant, si B est plus grand que A, la position résultat de A-B se trouve avant ce même point de départ. Là aussi on constate visuellement qu'avec seulement des entiers positifs il manque encore une notation pour exprimer par exemple -5. Les mathématiciens grecs auraient ensuite pu observer certaines caractéristiques des nombres négatifs puisqu'ils se comportent comme les positifs mais dans la direction opposée : il n'y a qu'à inverser les sens. Pour finir, comme la droite est continue, quelle que soit l'unité de mesure employée il est toujours possible de placer des points à des distances non-entières de l'origine. Ce paradoxe qui n'en est pas un aurait démontré les limitations de leur arithmétique bien plus concrètement que le problème du carré de surface double.
Pourquoi n'ont-ils rien remarqué alors qu'ils avaient dans les mains les éléments nécessaires ? Il semble que cela soit venu du fait que les 2 domaines de leurs mathématiques étaient considérés comme séparés. L'arithmétique sur des valeurs supérieures à 0 était manifestement destinée à dénombrer des objets. Auparavant, Pythagore avait posé comme principe que tout dans la nature était fondé sur les nombres entiers et il apparaît que cette conception a eu la vie dure. Cela a abouti pour eux à certains problèmes semblant insolubles.