Tout est relatif
Comme cela a été abordé dans C'est un diesel, l'assimilation de nouvelles informations nécessite leur interprétation, qui fait intervenir nos connaissances déjà établies. Cela signifie qu'un individu se représentera une description qui lui est faite en priorité d'après ce qui l'entoure. A moins que l'on ne prenne bien garde, quand c'est nécessaire, de l'avertir qu'il est question de faits ou d'usages autres que ceux dont il a l'habitude, il aura tendance à les rapporter à ce qu'il a vu auparavant plutôt qu'à quelque chose d'hypothétique et dont il n'aurait d'ailleurs vraisemblablement jamais entendu parler. Ceci s'applique particulièrement dans le cas de ce qui est transmis oralement en passant par de nombreux intermédiaires, comme les légendes.
Ainsi, dans de nombreuses religions ou mythologies il est question de montagnes où habiteraient des dieux ou des êtres surnaturels. Chacun en a déterminé l'emplacement, généralement parmi les plus élevés de sa région, tels que l'Olympe chez les Grecs anciens. Pourtant, comme on a pu trouver des similitudes et parentés par exemple entre les langues indo-européennes et donc en déduire l'origine unique dans une population qui se serait dispersée, il n'est pas impossible que de tels mythes, s'ils sont suffisamment anciens, se rapportent à un même lieu. Il aurait suffi que les récits soient répercutés pendant n générations pour être "naturellement" déformés. Il serait alors plus intéressant d'observer les éléments qui les rapprochent que ceux qui les séparent.
Les changements peuvent s'opérer sur des points de géographie mais aussi sur ceux qui concernent l'histoire. Une légende se rapportant à une ville peut être trompeuse si elle a été transmise oralement, au moins pendant une certaine période avant d'être fixée par écrit. Il se peut très bien qu'au départ il n'était question que d'un groupe de cabanes mais qu'au bout d'une durée relativement longue, les auditeurs ne connaissant plus que des villes bâties en dur et supposant qu'il s'agissait d'un endroit ayant un minimum d'importance pour s'être fixé dans la mémoire, aient par automatisme modifié sa description. Il est probable que les euphémismes sont particulièrement trompeurs entre des personnes éloignées -chronologiquement ou dans leur façon de vivre - puisque les raisons que l'une aurait "d'arranger" une expression ne sont pas les mêmes que celles de l'autre.